Je dois d’emblée vous faire un aveu, Masta P, mon compère m’avait prévenu et je ne l’ai pas écouté. Il m’a dit « LPN, il faut qu’on parle du Mali parce que, ce qui se passe là-bas, depuis la chute de Khadaffi, est grave« . Et moi, naïf , simplet ou les deux à la fois, je ne l’ai pas cru. Je lui est répondu bêtement qu’ Amadou Toumani Toure avait dit et redit qu’il quitterait le pouvoir au moi de Juin 2012. Qu’il laissait la campagne présidentielle se faire sans lui. Qu’il remettrait l’écharpe et, accessoirement, le job de président à celui qui sortirait vainqueur des urnes. Bref j’ai, de manière primaire, cru en cette démocratie naissante mais bien vivante malienne et, comme dans tant d’autres situations, je me suis réfugié dans mes vaines réflexions en fuyant la réalité.
Mais quelle est donc cette réalité que tu essaies de fuir exactement LPN ?
Certains diront, de manière simpliste pour surtout évacuer le problème, que les africains restent des africains. Qu’ils soient du Nord, du Sud, de l’Est ou de l’Ouest, nos cultures, notre être, notre psychologie, notre physiologie, nous oblige ou plutôt nous impose à toujours choisir le mauvais chemin même lorsque tous nous indique clairement que l’on est en train de se tromper.
D’autres, prônant la même politique de l’autruche mais de manière différente, blâmeront autrui pour leurs problèmes. Comprenez moi, lorsque l’on cherche bien on réussi toujours à prouver que derrière telle ou telle situation, au bled, se cache la main invisible de la France, des Russes, des Chinois, des Américains, des Franc Maçons, des Rosicruciens, des Juifs, des Nouvelles Églises Évangéliques, voire de Al Qaïda (j’espère que je n’ai oublié personne … et si c’est le cas, veuillez m’en excuser).
Ainsi donc, le fondement de nos destinés chaotiques serait une conjonction de facteurs biologiques que l’on ne serait maitrisé (pauvre de nous!!) et des facteurs externes sur lesquelles hélas nous n’avons aucun contrôle. Et bien vois-tu cher lecteur je suis de ceux qui, hélas pense autrement, et qui reste convaincu que la raison première de nos échecs résident dans les contradictions internes qui rongent chacun de nos pays et ceux depuis bien plus longtemps que nos indépendances.
L’une de ses contradictions que révèlent le cas malien concerne la place des militaires dans les société du bled. Que les choses soient clair, au bled, quand j’étais petit (les choses ont sans doutes, depuis, évoluées à la marge), pour mesurer la puissance toute relative d’une famille venue de rien on évaluait le nombre de médecins, de religieux et/ou de militaires que cette famille comptée. Pourquoi ? Car ce sont là les 3 mamelles de l’ascension sociale basée sur la méritocratie reconnues dans nos sociétés. Vous aurez beau être un grand commerçant, chercheur, innovateur, avocat, …, vous êtes incapables de sauvez une vie, une âme voire de préserver l’intégrité du territoire nationale. Vous êtes certes riches et vous avez sans doute réussi votre vie, mais vous n’êtes pas autant respecter que ceux qui exercent l’une de ces 3 professions.
Oui messieurs, être militaire, au bled du moins, est une forme de réussite sociale. Ce que les gens recherchent avant tout en embrassant la carrière ce n’est donc pas tant l’affrontement avec l’ennemi venu de l’extérieur, quel qu’il soit, mais avant tout, le prestige de l’uniforme et les honneurs qui vont avec.
Cela m’amène à évoquer un second point tout aussi important. Soyons franc, ces 60 dernières années, mise à part quelques tristes épisodes, le bled n’est pas réputés pour ses conflits inter-pays, en revanche, le nombre de coup d’état militaires orchestrés ça et là a ajouté une nouvelle dimension au fait d’être militaire. Aux respect et admiration que les gens avaient pour eux s’est ajouté un sentiment: la Peur. On en arrive donc à la contradiction qu’il est génial d’être militaire malgré les craintes que le fait de revêtir l’uniforme nationale comporte. Vous voulez un exemple ? Je vous en donnerait deux 🙂 :
- Les réussites ou non des divers soulèvements populaires lors du printemps arabe ce sont jouées dans la position de l’armée. En fonction de son positionnement, de son action et/ou de son mutisme, les révolutions ont fonctionné ou ont dégénéré. On avait à la fois peur de ce que l’armée pouvait faire mais il y avait également une forme de respect par rapport à l’institution et à ceux qui la compose, en espérant secrètement que l’agenda militaire coïncide avec le soulèvement populaire.
- En Afrique noire, si vous interrogez les gens vous verrez que les hauts dignitaires de l’armée sont forcément connus du peuple, que l’armée ait ou non le pouvoir d’ailleurs. A l’instar des grands médecins ou des dignitaires religieux, un certain respect conduisant à une impunité certaine entoure ces personnes. Je suis toujours étonné de voir avec quelle facilité au bled, les gens sont capable de citer les noms des hauts gradés de l’armée, de dire d’où ils viennent et pour qui ils/elles roulent politiquement. En comparaison, une telle démarche en occident serait vaine. Je suis sûr que la majorité des occidentaux ne connaissent ni de vue, ni de noms les personnes chargées de leur protection. Qu’il ne savent pas pour qui ils votent et ce souci guère de quelle région du pays ils viennent. Ce n’est qu’en temps de guerre qu’on leur présentera tel ou tel officier comme faisant partie de l’état major de l’armée et comme responsable de la sécurité de ses concitoyens.
Mais où veux-tu en venir exactement LPN ?
Hé bien cher lecteur les choses sont clair, il est temps que les militaires du bled optent tous pour un plan communication à l’échelle du continent. Le but ? Se défaire d’une partie du sentiment de peur qui les entoure. Ce plan communication signer par tous les hauts dignitaires des armées du bled devrait les voir s’engager à ne plus commettre de coup d’état, à ne plus s’immiscer dans la vie de la cité et à rester dans leur caserne, bref à devenir cette grande muette que nous envions à tant de pays. Car à chaque coup d’état qu’ils tentent et souvent réussissent, c’est une nouvelle dose de peur qui s’ajoute sur le mot militaire et surtout une perte de respect, de confiance et de légitimité pour tout un corps de métier au bled. De plus, cela incite les jeunes loups, moins gradés et généralement moins lotis à croire en l’effet levier d’un tel exercice. Dès lors, Ils suffit qu’ils se croisent autour d’un verre, qu’il s’accorde sur le fait qu’il valent mieux et sans crier gare, on bloque la télé et la radio nationale et on fait passé pour des idiots votre serviteur, tout un corps de métier, tout un pays, toute un continent.