Tout est dans le nom

Chez LPN, nous sommes très fort pour casser du sucre sur le dos des anciens et de leurs choix. Mais, parfois, nous avons quand même la sagesse de prendre du recul et de nous placer dans leur contexte avant de prendre parti. C’est sans doute l’effet du poids des ans qui nous fait doucement glisser dans le camps des vieux. Quoi qu’il en soit je vous propose aujourd’hui l’exercice suivant: revenir en arrière 50 ans pour voir quel nom vous auriez donné à votre bled.

Qu’est ce qui peut bien me pousser à déterrer ce vieux sujet qui fâche ? Rien d’autre que l’avènement prochain de la dernière née des nations africaines, le Sud Soudan. Comme pour tous les autres membres du club B.L.E.D, les sud soudanais ce sont livrés avec 50 ans de retard à ce fameux exercice du baptême. Comme à l’accoutumé, j’y ai vu une occasion de chambrer les nouveaux venus. En effet, quel qu’il soit, le nom sur lequel ils allaient s’arrêter serait un mauvais choix. Biens évidemment et pour me faire taire vous allez me demander quel est « le bon choix« . Eh bien c’est là le cœur de la problématique. Le plus simple consiste en fait à se baser sur la jurisprudence car celle-ci regorge de bons et de mauvais exemples.

Prenons au hasard le cas du Burkina Faso: à l’époque on parlait encore de la Haute Volta. Par un sursaut d’authenticité, les blédards ont changé le nom est sont devenus les habitant du « Pays des Hommes Intègres« . Étant au bled au moment du changement je n’ai pu que appuyer ce changement surtout que ça faisait enrager les blondins dans mon entourage. Car il y a une chose à savoir avec nos amis du nord, c’est que dès qu’ils voient un mot blédard, même le plus simple, ils ont un blocage ethnologique qui les empêche de le prononcer correctement, d’où un moment épique de rire assuré. Nous déduisons donc comme première règle que pour choisir un bon nom de pays blédard, il faut prendre un nom blédard. Pour ceux qui n’en sont pas encore convaincu je citerais le contre exemple du RD Congo qui est passé par la case Zaïre avant de revenir en arrière. Le nom blédard sera toujours préféré à un nom importer même si celui-ci est plus classe.

Sud Soudanais fêtant l’obtention de leur indépendance par les urnes.

Il y a bien sur aussi ce dossier de la conférence de Berlin qui revient à chaque fois polluer le débat. Les frontières internes du bled ont été tracées à la règle en faisant fi des peuples et nations habitants les lieux. Il s’ensuit que plusieurs pays peuvent prétendre légitimement s’appeler « Mali » , « Congo » voir même « Soudan » (tiens, tiens, tiens!!! ndlr).
De même les Soudanais estiment à juste titre avoir autant droit à ce nom là que leur nouveaux voisins du Sud. Un hater cultivé vous dira que « Soudan » viens de l’arabe « balad as-s?daan« , littéralement le « Pays des Noirs », et que donc ce nom peut être porté par n’importe quel pays du bled qui voudrait mettre ce critère en avant.

C’est que le Soudan, malgré son histoire chargée faite de conquêtes et de reconquêtes, est en fait un ensemble de peuple parfois très différents. Il ne peut en être autrement sur une telle superficie, les RD Congolais, les Nigérians et les Camerounais entre autre en savent quelque chose. Aussi est-il difficile de s’accorder sur un nom blédard qui convienne à tout le monde. On avait avancé pour le Soudan le nom de « La République du Nil » ou celui de « Koush » en référence à l’un des anciens royaumes de la région. Choisir l’un ou l’autre aurait créé une polémique comme celle qui agite les RD Congolais nostalgiques du mobutisme qui rappellent à chaque fois que seuls les habitants du bassin du fleuve Congo (les bacongos) devraient s’appeler des congolais.

« La République du Sud Soudan » puisque c’est le nom définitif qui sera entériné le 9 Juillet est donc un bon compromis. C’est un nom blédard mais pas vraiment du fait du préfixe que chacun va remixer à sa sauce. Il est suffisamment générale pour englober toute la population mais pas vraiment car le Nord porte le même alors qu’ils nous affirment pourtant être différents. Bon maintenant que la question du nom est tranchée occupons nous de la question qui fâche… qui sera responsable de l’Hymne nationale 👿 car comme on dit au quartier « le moins pire est souvent le plus mieux« .

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