Skype qui peut

« Ma liberté s’arrête où commence celle d’autrui. » disait un inconnu du nom de Jipé Sartre. Manifestement cette maxime n’a que très peu fonctionné pour les frères blédards d’Éthiopie. En effet, il viennent d’être privé de leur e-liberté dans l’ignorance quasi générale. Si on en croit les organes de presse internationaux qui en ont fait écho, les autorités éthiopiennes ont profité d’un moment d’égarement de la population pour faire passer une loi qui pénalise l’usage d’une célèbre plateforme de communication basée sur internet. Info ou intox ? LPN fait semblant d’enquêter.

Je ne sais pas si vous êtes comme moi sensibles aux méthodes modernes de communication publicitaire. Ces dernières années j’ai noté l’apparition d’une nouvelle méthode que j’ai nommé la méthode du Caliméro. Le manœuvre consiste à se déclarer victime d’une injustice insoutenable afin de créer un élan de sympathie dont l’ampleur est une mesure de votre popularité. Un exemple récent est l’indignation de Google face à l’oppression intolérable que lui fait subir le régime totalitaire de Beijing. J’ai donc soupçonné Skype de vouloir se faire un petit coup de pub en surfant sur la sympathie des internautes et de la presse internationale. Pour en avoir le cœur net il faut non seulement s’enquérir de ce que dit clairement cette législation mais aussi suivre le cheminement de l’info qui a fait buzzer la toile.

L’information originale est venue de la chaîne Al Jazeera, de plus en plus première sur les scoops de l’hémisphère sud. Pour marquer les esprits, elle a utilisé le nom du service le plus populaire: Skype. Mais en réalité ce sont tous les fournisseurs de services basés sur la VoIP qui sont concernés. Si vous êtes en Éthiopie et que vous avez l’outrecuidance d’utiliser un service de VoIP, vous encourez une peine de prison de 15 ans. Ce qui est inédit, ici, c’est que le gouvernement éthiopien fournie une justification de ses actions.
Il y a le pipo politique habituel: « Nous voulons sauvegarder la sécurité de l’état en permettant de filtrer et surveiller tout ce qui passe par sur terre, air et mer ». Plus surprenant ils y ajoutent à cela un argumentaire économique totalement assumé: « Nous voulons protéger le monopole de la société nationale Ethio Telecom » unique ISP du pays. Et ils mettent des moyens impressionnants pour bloquer l’immense trafic éthiopien et rançonner au prix fort (?) tout service qui voudrait obtenir un visa de passage.

Le résultat est, l’on s’en doute, une disparition de la toile des blédards (et de tout autre individu) basés en Éthiopie (ndlr: et je suis sûre que vous avez remarqué cela 🙂 ). Au delà de ce premier effet de bord social il y a un volet économique, parce qu’il y a que ça qui intéresse les gens semble-t-il. L’éthiopien échaudé par ces nouvelles restrictions se verra donc forcé et contraint d’élaborer de nouvelles techniques afin de faire passer ses informations et ses marchandises en dessous du radar gouvernemental.

Oui, l’État  aura l’impression qu’il a réellement cadenassé la vache à lait dans l’enclos. Et oui, il  aura tort, tout au plus il a réussi à déplacer le problème, voire à gagner du temps car comme chacun d’entre nous le sait: la Nature a horreur du vide.

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