Je reviens à nouveau vers toi cher lecteur avec encore une de ces questions qui te turlupine et à laquelle je répond généralement et invariablement par « à rien ». Aujourd’hui je m’intéresse aux partis politiques blédards qui contrairement à ce que l’on pourrait intuitivement penser sont en avance sur leurs pendants extra-africains. Démonstration.
Selon la nouvelle mère de tout le savoir de la planète:
un parti politique est une organisation articulant une action locale et nationale qui se différencie des syndicats, des groupes de pression ou d’autres mouvements par sa vocation à gouverner ou mettre en œuvre directement leur projet, à savoir, la conquête et l’exercice du pouvoir politique.
En voilà une belle définition, reprenons là depuis le début.
Qui dit parti, dit organisation, soit un groupe de femmes et d’hommes rassemblés au sein d’une structure. Son mode de fonctionnement rappelle donc très fort celui d’une entreprise. Une entreprise avec un business plan clair, la conquête et la conservation du pouvoir. Attractive elle lancera ses chasseurs de tête à la recherche d’autres éléments neufs pour grossir et étoffer ses rangs. Une hiérarchie chapeaute le tout, avec un chef au sommet qui, comme dans toutes les entreprises, n’est pas forcément élu mais est le plus souvent le fondateur originel de celle-ci. Dès qu’il n’est plus là ou qu’il est écarté, (c’est là le seul moyen disponible pour « perdre la tête » du parti: ndla) les membres restants se chamaillent jusqu’à faire sécession et fonder leur propre entreprise.. euh.. parti, je m’y perd moi même. Car il ne faut pas oublier qu’une entreprise et donc un parti n’est pas un lieu démocratique… restons sérieux quand même 🙂 .
En meeting durant l’année 2007 Henri Konan Bédié, candidat du PDCI au élections présidentielles de Côte d’Ivoire (source)
Le parti agit localement et à l’échelle national. Mais étrangement, au bled, un parti n’est réellement pris au sérieux que si il est présent … à l’international. Ce paradoxe explique pourquoi la majorité des partis politiques blédards décident d’installer à l’étranger un antenne forte. <sarcasme>Ce n’est donc pas une question de mise sous pression au bled</sarcasme> mais bien une question de visibilité. Les représentants locaux devront eux hélas s’armer de courage (et d’un bon forfait de téléphonie mobile :ndla) pour relayer l’info à la base locale, régionale voire nationale.
Un parti n’est ni un syndicat ni un groupe de pression car il a pour finalité de gouverner. Dans les faits c’est parfois assez flou car les partis corporatistes du genre « parti des bûcherons » ou « parti islamiste » côtoient allègrement les parties ethniques ou du moins à forte connotations identitaires. Plus au Nord, « Chasse Pêche et Nature« , en France, n’a rien inventé en la matière. Ces partis marginaux se coupent alors eux même de toute éventualité de représentativité du bled et d’ailleurs ils n’en expriment pas l’ambition. Ils traduisent plutôt un ras-le-bol d’une profession ou d’un groupe social qui ne trouve pas écho à ses revendications dans les partis classiques. Ils prennent donc cette forme juridique afin de, modestement, influencer, tel des ONGs, le résultat des votes en leur faveur. Je ne sais pas pour vous mais moi j’appelle cela un groupe de pression ou lobby et c’est contraire à la définition de parti sus mentionnée.
Quelle est la finalité d’un (vrai) parti ? Conquérir le pouvoir politique et l’exercer. A défaut, ils se placent en embuscade dans cette zone floue appelée l’opposition (celle que mon compère LPN a si bien expliqué qu’elle ne sert à rien :ndla) en attendant une alternance politique hypothétique à la faveur du scrutin suivant.
Initialement les seuls armes autorisées sont les idées. Mais les partis du bled ont très tôt intégrés le pragmatisme qui veut que des idées pour nous sortir du marasme… il n’y en a qu’une (je vous laisse décider laquelle :nlda). Le débat ne portera plus sur cela donc mais bien sur les hommes qui portent ces idées qui dirigent ces partis et plus tard la nation. Choisir « un gars fort qui représente bien » comme disent les rappeurs c’est plus facile, convenons en, que de se casser la tête à comprendre la nuance entre le social démocratie, le chrétienne démocratie, le néo-libéralisme capitaliste, l’écologie participative et j’en passe… en bref on s’en tape un peu du projet de société 😉 .
En conclusion, quand je dis que les partis ne servent à rien, il faut bien interpréter mes propos qui ne sont pas un dénigrement de l’institution. Ce que je veux dire c’est que l’hypocrisie doit cesser: qu’il tombe le masque et qu’ils s’appellent clairement « entreprise privée » ayant pour vocation de prendre le contrôle de la « holding » B.L.E.D. Cela aura le mérite d’être clair pour tout le monde et en premier nous les électeurs ouvriers de bases.
7 Commentaires
Eddy
Mais MasterP tu te relaches là. Attends je vais corriger la réponse pour toi: les partis ne servent STRICTEMENT à rien! Et quand on voit leurs lamentables bouffonneries dans les pays dits démocratiques, on ne peut s’empêcher de rejoindre dieu assis sur le rebord du monde et de pleurer avec lui toutes les larmes du corps.
Citation: « Mais étrangement, au bled, un parti n’est réellement pris au sérieux que si il est présent … à l’international. » (fin de citation)
Encore un héritage du passé. L’africain ne se sent exister que quand il a l’approbation de ses anciens maîtres. Et il faut voir tous ses chefs de partis, qui, se targuer d’appuis et soutiens « extérieurs », qui, se pavaner et pavoiser avec un ambassadeur « de là-bas ». C’est à chialer de rage.
Il faut aussi dire à leur décharge, que de telles dérivent existent parce que les électeurs le permettent. C’est à eux de faire marcher la démocratie, mais bon, quand tu vois qu’ils préfèrent aller à la pêche plutôt que de regarder de plus près ce que font leurs élus et partis..
oniN
Ouh là, ce n’est même pas seulement « Mais étrangement, au bled, un parti n’est réellement pris au sérieux que si il est présent … à l’international. », mais aussi, un parti ne devient réellement sérieux que quand il a une présence à l’international…
Cette présence n’est pas seulement une condition suffisante, elle semble nécessaire. Donc, nécessaire et suffisant, ceci donne une équivalence: parti sérieux au bled parti présent à l’international.
Alban
Une chose m’étonne dans votre billet MastaP vous dites que le parti politique n’est pas un lieu démocratique hors un parti politique s’inscrit dans une démarche démocratique. Si le parti n’est pasdémocratique comment peut-il ? prétendre défendre une notion qu’il ne suit pas ??
Alban
@oniN vous semblez dire qu’un parti au « bled » peut se passer d’une présence au niveau nationale tant qu’il a un bastion ou un bureau à l’étranger (comprendre la France) ? Alors que représente réellement un parti politique si il n’a pas d’assise au pays même ?
MastaP
@oniN – Encore une fois je place une (mauvaise) blague et je suis le seul à comprendre. Il fallait comprendre ceci: vu les nombreux manquements à démocratie dans certains pays du bled, les « opposants » fuient le pays et créent des partis à l’étranger. Il s’en suit que le parti a defacto une « aura » international car c’est le seul terrain où il existe réellement. Que je ne vous reprenne plus à m’obliger d’expliquer mes (mauvaises) blagues (lol).
oniN
Alban,
Il faut savoir que chez nous, un « parti politique », c’est souvent son bureau et ses instances. Peu de partis connaissent le nombre de leurs militants, ou de leurs sympathisants.
Napoleon
«Si le parti n’est pas démocratique comment peut-il prétendre défendre une notion qu’il ne suit pas ?? » : MastaP donne la réponse dans sa conclusion et c’est l’essence même de son billet.
Le principe de la démocratie veut que tout groupe de citoyens puisse se constituer librement, s’il le désire, en parti politique pour promouvoir et défendre ses idées. Ce que veut dire MastaP, si je ne m’abuse, c’est que cette entité, fruit de la « démocratie », n’a très souvent pas un fonctionnement interne démocratique. Ce qui se transposera, à coup sûr, à la gestion du pouvoir politique une fois conquise.
Ils doivent donc, pour être sincères, s’appeler « entreprise privée » …