Et ce qui devait arriver arriva. Le Kenya vient de pénétrer sur le sol de la Somalie avec armes et fracas. Le but de l’opération: mettre un terme aux agissements belliqueux de Al Shabbab, la branche africaine de Al Quaeda. Cette dernière est en train de franchement mettre en péril la première industrie de son voisin du sud: le tourisme. Et la souveraineté somalienne ? Personne ne semble s’en soucier car tout le monde appuie l’opération. Analyse d’une tendance qui est devenue monnaie courante au bled.
Il y a deux notions de base qu’il faut au préalable énoncer:
- La première est le nationalisme exacerbé de tous les blédards. C’est sur base de cette règle tacite que au sein de n’importe quel pays du bled on fonctionne en vase clos. Nos affaires, quelles qu’elles soient, sont nos affaires et ne regardent que nous. Nos voisins ne viendrons pas regarder ce qui se passe chez nous et en contre partie on en fera de même.
- La deuxième, historique celle-là, est la stratégie du « Hit and Run » (ou « Coupé Décalé » en français: ndla) qui consiste pour tout mouvement national
rebellesd’opposition de se planquer au delà de la frontière la plus proche après tout acte ou déclaration contre le pouvoir en place. Cette « stratégie » s’appuyait sur le premier principe énoncé ci-dessus pour éviter tout velléité de représailles de la part du pouvoir.
Les troupes kényanes en Somalie (source capitalfm.co.ke)
Mais voila, les choses étant ce qu’elles sont, les états ont petit à petit, à contre cœur, commencé à sérieusement s’intéresser à ce qui se passait chez leurs voisins. Le fait (récent?) que la pagaille qui y règne chez l’autre finie tôt ou tard par arriver chez soi porte à, disons le, s’immiscer dans ces affaires surtout quand elles montrent un certain penchant à devenir nos affaires.
Mais ce n’est pas cet aspect de la chose qui retient notre attention aujourd’hui: c’est la réaction suite à cette ingérence. Là où par le passé tous les blédards auraient protesté dans leur barbe, aujourd’hui ils ne disent plus rien. Là où par le passé on estimait que les interventions chez autrui ne pouvaient être effectuées que par les forces étrangères (comprendre occidentale ou outre bled), aujourd’hui ils s’invitent chez le voisins sans même lui demander son avis. Quel est le message derrière tout cela ? Il est simple, Il dit que à l’échelle continentale on doit se prendre en main et ne pas attendre l’intervention d’une quelconque puissance extérieure. Mais c’est là un vœux pieux.
Dans les faits cela ne prévaut que pour les petites actions genre l’incursion du Kenya en Somalie, de l’Éthiopie en Somalie (encore), ou de tout le monde en RD Congo. Pour les vrais grosses opérations genre bombarder la Libye, on voit la limite des capacités du continent. En effet à plus de 10 millions d’euros par mois d’intervention, on ne se bouscule pas au portillon pour aller s’empêtrer là bas: on préfèrera dans ce cas une solution politique.
La politique justement, parlons-en, c’est la nouvelle frontière où l’ingérence est d’application. En proposant de juger Hisen Habré les rwandais ont jeté un autre pavé dans le marigot que les blédards ont, eux même, creusés. A force de clamer haut et fort que l’on peut résoudre nos propres différents sans l’aide occidentale, on en a oublié les conséquences à long et moyen terme. Quelles sont elles ? La principale d’entre elle sera sans nul doute l’animosité entre les peuples dirigeants du continent. Jusqu’à présent, avec les criminels de guerre et les dictateurs, ils étaient jugés par des biblos anonymes, très lointains de chez eux, le bouc émissaire était donc tout trouvé. Hors aujourd’hui ou demain, ce bouc ce sera un « frère » du bled qui broute à côté de notre verte pâturage avec tout les côtés positifs et négatifs qui en découlent.
La morale de l’histoire est que nous autres blédards devrons rapidement nous habituer à tourner 7 fois notre langue dans notre bouche avant de parler à la première personne du pluriel car nos nations vont entrer dans une série de chocs frontaux qui seront autant de tests pour notre légendaire fraternité. Accrochez vous: c’est parti.