Bien souvent, un thèse réflexion développée sur un blog a du mal à être compréhensible à la première (et souvent seule) lecture d’un billet. Aussi à-t-on pour tradition de jeter dans le texte un petit exemple tiré de l’actualité la plus fraiche. Il y avait un sujet que je voulais défendre depuis un bail et voilà qu’un fait divers récemment survenu au Cameroun me permet de l’aborder: il s’agit du recours à la vidéo dans l’arbitrage … de ce terrible match qu’est la vie.
Je suis tombé sur cette histoire via un autre blog qui lui même affirmait tirer ses infos du site web du périodique camerounais le Messager. Je vous résume l’affaire en quelques mots tout en invitant les plus friands de faits divers parmi vous à lire l’article source. Des étudiants d’un campus de la capitale camerounaise Yaoundé se livraient à une joute footballistique lorsque soudain le ballon quitte le terrain pour « malencontreusement » atterrir sur le tête d’une étudiante. Le choc avec le ballon occasionne hélas des dégâts aux lunettes et à l’amour propre de la jeune étudiante. Ni une ni deux la jeune fille promet que la foudre va bientôt s’abattre sur les « footeurs » de trouble. Dans les heures qui suivent deux malabars tout de treillis militaires vêtus font irruption sur le campus et assènent une corrections aux gaillards, pire que celle qu’ils ont sans doute connu lors de leur bizutage. Qui avait tort , qui avait raison ? Là n’est pas notre préoccupation première pour aujourd’hui. Non, ce qui m’a interpelé est que l’entièreté de la scène de ratonnade a été filmée grâce à des téléphones portables d’autres étudiants et directement balancée sur le Net (ndla:Merci Dame Technologie de ne pas vous être arrêtée à la frontière du bled).
On vous le dit et le répète: le monde est mondial même pour ceux qui font de la résistance les faits sont là. Ce réflexe de tout filmer que l’on croyait propre à l’occident est tout aussi présent au bled. J’en veux pour preuve la composition des 5 premiers rangs de tous les concerts auquel j’ai assisté au bled ces derniers mois: uniquement des filles et garçons caméramans-téléphone mobile en herbe. Au delà de ce comportement en diapason avec une mode planétaire il y a également un changement dans la comportement des individus filmés. Nos deux malabars du campus ayant eu vent de la présence de « cameras » et d’images compromettantes sont revenus sur les lieux de leur forfait et ont essayé coute que coute de mettre la main sur les images. Ils ont usé d’intimidations (ndla: encore une fois? dommage que ça aussi n’a pas été filmé mais en même temps qui sait …) et, face à l’échec, ont même proposé d’acheter les images au prix fort.
La gendarmerie Camerounaises (source)
Qu’est ce que je lis aux travers des lignes de ces évènements? Premièrement que le camerounais ne coure pas plus vite qu’une balle. Cela explique sans doute la contre-performance des Lion au mondial 2010 🙂 . Plus sérieusement, on devine par la vitesse de réaction des hommes en treillis que ce genre de coup de force d’hommes en armes est hélas chose courante. Tous le monde au bled à une histoire d’abus d’autorité en tête qu’il garde au frais et qu’il est prêt à ressortir dès que le gars en question sera en disgrâce. Ce genre d’action jette un immense discrédit sur l’institution qu’elle soit militaire et/ou policière. En fait, j’ai noté que les blédards aujourd’hui n’ont pas peur de la Police ou de l’Armée, mais leur trouille du policier Tartempion et du militaire Lambda, elle, est bien réelle. Les hommes ont eu tendance à ce substituer aux institutions et à chacune de leurs exactions celles-ci perdent un peu plus de leur pertinence et de leur aura.
Deuxième et dernier point que je voulais relever: avez-vous bien noté la différence de comportement de nos affreux dès qu’ils se savent filmés ? Ils paniquent, ils négocient, ils hausse la voix mais plus aucun coup n’est donné. Car à partir d’aujourd’hui, à chacune de leur action ils sentiront des yeux électroniques en train de les épier dans l’ombre. Ce fait divers est, je vous l’affirme, le reflet de ce qui se passe de plus en plus au plus haut niveau de certains de nos bleds. Des exactions flagrantes étaient et sont toujours commises uniquement parce que les auteurs savent que personne ne les a vu les commettre. Mais aujourd’hui les images et les sons circulent à la vitesse de l’électron. Il devient, dès lors, de plus en plus difficile de faire n’importe quoi à grande échelle et de s’en tirer ni vu ni connu. C’est pour cette raison que des personnes comme moi sont optimistes quand ils voient le taux de pénétration formidable et l’accessibilité de la technologie d’information au bled aujourd’hui. Attendez seulement que l’on mette la main sur le broadband. Sans le savoir, on a mis entre les mains des blédards des instruments qui pourront assurer une forme relative de protection et réduire l’impunité de certains cow-boys qui se croient toujours au Far West, et tout cela sans tirer aucune balle.
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