L’Habit Fait Le Moine

En règle général, un fait divers interpelle tout le monde. Cela est du au fait qu’on s’identifie aux victimes ou  que l’on pense reconnaître en l’auteur des faits un voisin, un ami, une connaissance ou tout simplement un habitué de son quartier. Mais des fois, il arrive que les faits parce que tellement gros n’arrivent pas à suffisamment fédérer la population ou comme dirait un mien ami scientifique n’atteigne pas l’énergie d’activation nécessaire pour intéresser les gens.

L’histoire que je vais vous relater se déroule en Europe dans une petite bourgade belge du nom de Loyer. Excusez le jeu de mot pourri, mais justement ce sont des affaires de paiements mensuels qui ont révélé le pot aux roses. A Loyer donc, officie un prêtre catholique qui répond au doux nom de Edouard Kabongo. J’en profite ici pour informer les lecteurs blédards à la recherche d’une vocation que à l’instar du personnel médical, le personnel ecclésiastique est en forte demande en Europe. C’est d’ailleurs pour pallier à ce manque, provoqué plus par la défection des jeunes européens que par un déficit de  naissance surmédiatisé, que notre ami Kabongo a quitté son RD Congo natal pour venir officier en Belgique.

Treize années durant Edouard Kabongo officie pour le plus grand plaisir de ses paroissiens jusqu’à ce terrible jour d’Avril où tout bascule. En effet, un malencontreux contrôle de routine au niveau de l’administration fédérale belge révèle que le sieur Kabongo est enregistré de part et d’autre de la frontière linguistique.
Pour ceux qui ne sont pas familier avec le contexte belge, il existe à l’intérieur même de ce pays une frontière mentale mais bien réelle au delà de laquelle la langue parlée change. Les positions linguistiques des uns et des autres sont tellement tranchées qu’elles bloquent parfois la communication pratique entre les deux communautés jusqu’au niveau fédérale.
C’est cette singularité belge qui a permis à une personne aussi douée que Mr Kabongo de tromper le système en s’inscrivant comme prêtre à Loyer en Wallonie mais également comme réfugié à Malines, en Flandre. Mais cela ne s’arrête pas là, puisque les règles de bienséance et d’intégration l’on même conduit à amener femme et enfants sur place afin d’y construire leur nouvelle vie. Mais Mr Kabongo en touchant les diverses aides et allocations que l’état offre aux personnes dans la situation qu’il revendiquée a touché la corde sensible du système: son portefeuille.

Ce qui m’interpelle, et qui justifie que cette histoire n’est relégué que en seconde zone dans l’échelle du sensationnelle, est qu’il n’y a aucune personne physique qui a été flouée. Du coup l’élan de sympathie se fait plutôt en faveur du faux prêtre que contre lui. Aucun paroissien de Loyer n’ayant été molesté ou dépouillé, ce qui convenons-en est plutôt rare par les temps qui courent, ceux-ci sont parmi les premiers défenseurs de l’homme. De même aucun individu de Malines n’a été volé si ce n’est la personne morale qu’est l’État. L’État ? Et alors ? Nous sommes en période de crise et quand c’est la crise tous les moyens sont bon pour subvenir au besoins de sa femme et de ses enfants. Non vraiment il n’y a rien dans ce dossier pour que l’on y passe du temps. C’est d’ailleurs avec une certaine gène que la sanction pour usurpation d’identité et fraude aux allocations a été prononcée par les autorités judiciaires.

La morale de l’histoire est que certains événements s’obstinent à vouloir faire la une des journaux contre vents et marées. Et dans le cas présent l’ultime rebondissement digne d’un film de M Night Shyamalan est venu de Suisse: le faux curé avait également une seconde épouse et des enfants en Suisse. Je vous laisse imaginer les gros titres en préparation dans les rédactions pleines de créativité du genre « Le Loyer du Curée Polygame de Malines filait en Suisse ». Mais voilà le hasard à voulu que la même semaine le gouvernement belge ait  sauté volant du coup non seulement La Une mais toutes les autres pages des quotidiens nationaux. Donc à moins que Mr Kabongo soit capable de régler les problèmes belges et de renflouer les caisses de la Grêce, son cas est définitivement classée au oubliette.

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Le Petit Nègre s’améliore chaque jour. Bravo pour le sens narratif et l’humour qui fait passer bien des messages.

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