«À ceux qui me demandent raison de mes voyages : je sais bien ce que je fuis, et non pas ce que je cherche.» – Montaigne
Raisonnement de saison: il fait froid en Europe donc je me casse au bled. Ne nous voilons pas la face: n’importe quelle personne qui dispose de moyens et du temps nécessaires n’hésite pas une seconde. Mais contrairement à ce que les médias veulent faire croire « les gars » ont multiplié les initiatives pour nous dissuader d’effectuer notre migration saisonnière. En voici quelques exemples.
Au premier rang je place les soldes. Les temps sont durs pour tout le monde mais personne n’ose le reconnaître ouvertement. C’est pour cette raison que l’on profite de cette période de rabais sur les prix pour se constituer une petit stock de « paraître » (ndla: j’ai entendu les « jeunes » appeler ça du « swag » ou « swagger« ). Mais voilà en général on achète des habits pour les porter tout de suite pas dans six mois. Hors les Soldes d’Hiver proposent des articles d’Été. Je veux bien les acheter mais pour les porter il faut aller plus au sud. Les moyens étant ce qu’ils sont il faut faire un choix: admirer ses habit d’été en Europe ou payer son billet et descendre habillé comme un plouc. Ceux et surtout celles qui ne sont pas prêts à assumer la seconde option: restez en Europe. Même le truc qui consistait à faire les soldes une année et rentrer au bled l’année suivante ne marche plus. Le monde est devenu mondial et les blédards savent en même temps que tout le monde ce qui est démodés. J’en ai fait la triste expérience lorsque ma nièce n’a pas voulu du téléphone à écran non tactile que je lui ai amené de l’étranger.
Au second rang il y a les organes d’information. Les blédards du bled sont les premiers à s’en plaindre. Le bled à une image négative à l’étranger. Quand on cumule les activités des mouvements rebelles, celles des cartels de la drogue, celles des cartels de la fois, les maladies, les différences culturelles, le climat, la faune sauvage et la flore hostiles le bled est aux yeux des médias du nord un lieu infréquentable. De ce fait à chaque fois que j’annonce mon départ prochain il ne manque pas de personnes pour me retenir. Souvent ils argumentent en me sortant de mémoire le dernier reportage qu’ils ont vu sur le bled et me garantissent que je vais littéralement exploser dès que je sors de l’avion. « Mais alors comment font les gens qui vivent là bas ? » demandais-je perplexe. « Ah mais eux ils sont habitués tu sais » me répond-t-on. J’ose croire que étant comme « eux » que si je vais là-bas je devrais pouvoir m’en tirer moi aussi. Dont acte.