Quand j’étais gamin je n’avais qu’une seule ambition: devenir ambassadeur de mon bled. Peu importe dans quel pays, peu importe sur quel continent, il fallait à tout pris que je sois à cet avant poste du choc des nations et des cultures. Et directement vous vous demandez à quoi peut donc bien servir cette maison et son tenancier pour que votre serviteur souhaite mordicus s’y installer ?
Les Ambassades, je suis tombé dedans gamin. C’était une époque où les frontières étaient plus que fermées mais, aussi, les candidats à la migration moins nombreux. L’ambassade était le seul lieu où l’on pouvait croiser des compatriotes, retrouver l’ambiance du bled et, cerise sur le gâteau, parler la langue du bled. Plus tard c’est en tant qu’étudiant que j’ai fréquenté l’endroit un peu pour les même raisons que auparavant mais aussi pour accompagner les potes qui devaient y retirer l’argent de leur bourse d’étude (et oui on a pas tous eu la chance d’être boursier – ndla). Là encore la convivialité était au rendez-vous. Pot d’accueil des nouveaux étudiants, activité à chaque fête du bled et un Ambassadeur toujours accessible et prêt à dépanner les gens empêtrés dans les problèmes delà vie à l’étranger.Encore une fois la fameuse maxime était respecté:
« Un policier ça recherche un coupable, un diplomate: une solution » – HGM D’Oreteau dans « Le Diplomate ».
Et puis un jour les choses se sont détériorées. Les réceptions ont disparu, l’Ambassadeur s’est fait rare et, comble du comble, les bourse d’études ont été divisées par deux quand elles ne disparaissaient pas complètement. L’immigration aidant, les cafés, boutiques et centres culturels du bled ont ouvert et ont sérieusement entamé le monopole de la convivialité du bled détenu jusque là par les Ambassades. Double nationalité et intégration aidant, les gens ont appris à chercher ailleurs, dans d’autres institutions locales, une réponse à leurs problèmes quotidiens. C’était temps mieux car les remous politiques au bled faisait de l’ambassade une zone d’instabilité sociale permanente: les ambassadeurs et le personnel étaient changés sporadiquement.
Rencontre à l’Ambassade Guinée à Paris (source)
Aujourd’hui, les ambassades du bled ne sont plus connues que par la rubriques des faits divers. On parle de la traite du personnel de maison venant du bled et séquestré dans les locaux de l’ambassade. On parle des frasques et bavures des diplomates qui se cachent derrière la sacro sainte immunité diplomatique. On parle aussi des scandales à répétition dans l’usage de la valise diplomatique. L’ambassade est devenu avant tout un guichet de vente: VISA pour le bled, passeport, acte légal en tout genre. Mais le plus triste est que la maison a vu son esprit d’accueil disparaitre avec l’arrivée d’une certaine politisation de la fonction. L’Ambassade est clairement le représentant de l’État et non de la Nation. D’où un certain manque d’intérêt de la part de toute une frange de la population. Mais la politique ne justifie pas tout. La fermeture du robinet monétaire a aussi été fatale à certaines représentations à l’étranger. Certains de ces beau bâtiments souvent situés dans de beau quartiers, sont parfois des belles coquilles vides: le mobilier étant saisi ou vétuste. Cela choque surtout ceux qui ont encore en tête la période de l’opulence où l’es ambassades alignaient des grosses cylindrées et du personnel plus que grassement payé. Il a bien fallu rationaliser et couper les couts exorbitant de cette vitrine. Les plus efficaces ont renvoyé le coté administratif dans un consulat annexe surtout adresse aux bledards. La chancellerie, elle, conserve le nom d’ambassade et le rôle réellement diplomatique d’interface avec l’étranger.
Ceci dit quand l’argent et la stabilité sont au rendez-vous, la fonction retrouve alors tout son prestige et son éclat. L’Ambassade sert de nouveau à quelque chose ou plutôt à quelqu’un. Il redevient ce point central où les bledards se retrouvent pour tout ce qu’ils ont en commun. J’exhorte donc par la présente mes compatriotes à ramener la paix et la prospérité au bled afin que je puisse renouer avec mon rêve de gosse. D’avance: Merci !
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