Pourquoi l’Afrique n’a pas besoin d’internet

gsm-shareAvec un titre aussi racoleur, je sens que je ne vais pas me faire que des amis :). Mais ce n’est pas grave contre la majorité de l’opinion générale, je vais essayer de défendre ma logique et mon point de vue et j’espère que certains parmi vous auront l’honnêteté de sinon, pas en partager la conclusion, mais au moins le constat. Et avec un peu d’en train je suis sur que vous arriverez à la même conclusion : l’Afrique n’a pas besoin d’internet.

Le net, même si dans certaines parties du monde est devenu un moyen de communication quasi vital, élevé au rang de droit fondamental, n’a rien de trivial au bled : Infrastructures naissantes, débouchés sommaires, utilisations précaires. Rien ne laissent à penser que cet outils soit réellement utilisé ou utilisable dans toutes ses capacités au bled. Les pays du bled sont pour la plupart tellement en retard dans l’adoption des technologies annexes à l’internet, qu’indiquer partout que le développement du bled se fera via les NTIC est une posture que je trouve difficile à tenir sur le long terme.

Pour illustrer mon propos, il suffit de voir comment les pouvoirs publics traitent la question de l’installation et de la diffusion des nouvelles technologies au bled. On croirait revivre le traitement affligé, en son temps, à la téléphonie fixe ou à la Poste. Tout est fait pour considérer les moyens de télécommunication comme une mode passagère. Cela se voit, par exemple, dans les plans de développement des télécommunications. On dirait que nos décideurs, honteux de voir ce que font les autres ailleurs, s’empressent assez maladroitement d’ailleurs de singer l’adoptions des moyens de télécommunication sans aucune vision globale. Ainsi en regardant la localisation des réseaux et leur étendu dans un pays on peut mesurer assez facilement le taux de pénétration de la mode… heu de la technologie.

Si un pays possède, un réseau postale sur 3 villes et un réseau téléphonique digne de ce nom sur 2, cela signifie que le buzz pour l’installation des bureaux de postes n’a duré que le temps de l’établissement d’un réseau sur 3 villes… et que la téléphonie mobile a débarqué au moment ou l’on achevé de câbler la 2ème ville du pays. L’installation des bureaux de poste est devenu has been en comparaison de ce que l’on pouvait faire avec un téléphone fixe et un fax. De même, pourquoi continuer l’installation de la téléphonie fixe vue que la téléphonie mobile c’est plus simple!!

Paysan burkinabé avec son téléphone mobile – burkina-ntic.net
paysan_petit

En règle général, au bled, on a tendance à mettre la charrue avant les bœufs, du coup tout le monde apprécie l’arrivée du net et on en oublierais même qu’il existe des besoins bien plus importants et plus pressant à remplir. A quoi peut bien servir le net si un pays ne possède pas :

  • de réseau routier et/ou ferroviaire adéquat;
  • un réseau de soins de santé digne de ce nom;
  • un enseignement de qualité permettant à chacun de vivre dignement;

Oui, le net peut aider à mettre en place les solutions aux 3 problèmes soulevés ci-dessus, mais il ne servira que de moyen… pas de finalité. Le net c’est un outils, au même titre qu’un pigeon voyageur ou qu’un tam-tam, si il est bien utilisé, il permettra un bon en avant indéniable, mais à lui tout seul il ne sert à rien!

Bref, la prochaine fois que l’on vous dit que tel ou tel personne a mis au point une superbe application mobile spécialement pour le bled permettant aux agriculteurs de tel ou tel pays d’accéder à la météo et les aidant à mieux prévoir les récoltes. En lieu est place d’être émerveillé devant l’avancé technique, posez-vous les questions suivantes:

  • Le réseau mobile ou fixe arrive-t-il jusqu’au village des dit agriculteurs ?
  • Les paysans sont-ils capable de lire et de comprendre les SMS reçues ?
  • Les paysans sont-ils apte à partir effectuer leur récolte ou sont-ils en train de mourir d’hépatite et/ou de HIV parce que dans leur localité il n’y a pas de dispensaire, d’assistant social, d’eau potable ?
  • A quoi cela peut-il servir si aucune route digne de ce nom permet d’acheminer le fruit de leur labeur vers des centres de distributions adéquats ?

Vous voyez que j’ai raison, l’Afrique n’a pas besoin du net, elle a juste besoin de plans de bataille pour vaincre des problèmes basiques mais ô combien vitaux.

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13 Commentaires

Trés bon article !! ça fait deja un bout de temps que je suis votre blog.

Analyse trés pertinente, même elle me touche directement vu que je travaille dans le web…

Hé bien, j’aime beaucoup le ton de l’article à croire que je finis par vraiment apprécie le style LPN. lol!

Plus sérieusement :

Je plussoie, aujourd’hui ont peut dire que le net au bled ne sert à rien. En effet, si demain il n’ya plus de net au bled, la vie quotidienne des blédard ne sera pas dramatiquement boulverser, voir pas boulverser du tout. En tous cas, certainement pas au Cameroun, pou citer un exemple que je connais bien. Pour communiquer-echanger avec « l’extérieur », il existe de nombreux moyens altenartifs et nttement plus populaire parmis les quelles : le téléphone mobile et/ou fixe et … le bon vieux mandat postale/western union :). Rien qu’avec ça, le pays fonctionne, pas besoin d’ajouter le net à la liste. Si quelqu’un pense le contraire, honnêtement, je suis impatient de lire son argumentation.

Cependant, il y’a une nuance importante à faire : quand tu parles du net au bled, tu parles implicitement … du WAF, a.k.a le « Web Africain Francophone ». Or, tu as toi même souligner dans quelques mémorables billets, les nombreuses lacunes du WAF par rapport au « WAA », comprenons Web Africain Anglophone. Du côté du WAA justement, la réponse quand à l’utilité du net en Afrique sera nécessairement moins « catégorique ». En effet, quand on voit par exemple qu’un outil tel que ushaidi à été décisif dans la couverture de la récente crise humanitaire au Kenya, quand on constate le grand interêt de Google pour le WAA ou encore quand on lit un billet aussi intéressant que celui ci ( http://is.gd/2NQWK ) qui parle de la problématique de développer pour des services de types « SMS ou IP » pour le marché africain, ont comprend bien que le WAA n’est certainement pas au même niveau que notre bon vieux WAF du bled.

En conclusion: Concernant le WAF, et dans l’absolue, je partage ton avis.

LOL,

Tu es prévoyant. Tu préviens qu’on peut partager ton constat, mais pas ta conclusion. Et pour cause, la conclusion n’est pas motivée par le constat (sinon, il serait bien difficile de partager le constat et pas la conclusion..).

Internet ne sert à rien, et Internet ne sert pas à tout le monde, c’est très différent. Ton constat aux paysans, mais est-ce la seule composante de populations du bled?
Le taux de bancarisation est faible en Afrique sur les paysans, faut-il supprimer les banques?
Le taux de lecture des journaux est faible aussi, a t-on besoin de journaux et de journalistes?

** Le prof de la catho est bien content que déjà 20% de ses étudiants puissent aller faire des recherches sur Wikipedia parce que les biliothèques sont vides ou inexistantes
** Les 6% d’étudiants qui partent du pays chaque année sont bien contents d’aller sur le net obtenir des infos sur les universités étrangères, car les ambassades et autres consulats ne disposent pas de ces infos
** De plus en plus de chercheurs d’emploi préfèrent rester dans leur ville et voir les offres sur Internet, plutôt que migrer vers la capitale à l’aveuglette sans même avoir une idée ce qu’ils pourront y trouver
** Les 30% de hauts fonctionnaires qui échangent par Yahoo (pas sécurisé, pas professionnel, etc..) sont bien contents de pouvoir pousser en 1 fois, un document à 10 personnes, plutôt que faire 10 appels téléphoniques ou 10 envois postaux
** Les 43% de responsables d’organisations civiles qui sont bien contents de disposer du net pour correspondre avec leurs homologues de l’étranger avec lesquels ils ont un fort décalage horaire, vivrait dans l’isolement en cas de coupure d’Internet
** Les 23% de personnes appartenant aux classes moyennes sont bien contents d’aller dans des cybercafés lire leurs mails, et fureter sur des sites (peut-être futiles, mais c’est à eux de décider où ils ont envie de surfer tant que c’est légal)
** Les 7% de femmes majeures qui cherchent leur mari blanc sont bien heureuses d’avoir le net aujourd’hui, qui a vu exploser leurs taux de réussite. Oh, on peut les critiquer, mais comme elles sont majeures et que chercher un mari blanc n’est pas encore illégal, on n’y peut rien
** etc…

Bref, la population d’agriculteurs ou de paysans n’est pas la seule à considérer avant de dire qu’Internet est inutile.

Tu connais l’histoire de la fusée congolaise non? Le programme Troposphère, tu militerais aussi pour son arrêt car le bled n’en a pas besoin? Après tout, ça n’aide pas le citoyen extracteur de manganèse dans les mines du Kivu.

Les pbs ne se résolvent hélas pas d’abord un, puis l’autre, mais tous à la fois au niveau d’un pays, car tout s’emboite.

Le net est un outil, d’accord. L’Afrique a sans doute besoin de routes aussi , d’accord. Il manque les deux. Mais je me demande si c’est bien un problème d’outillage. Tu te souviens de la discussion autour de l’élévage de poulets ? C’est plus grave que le manque d’outils…

Un enseignement de qualité, une stabilité politique, ure volonté politique d’attirer les investisseurs, une juitice efficace et impartiale, une monnaie fiable : voila de l’immatériel qui n’est pas toujours présent en Afrique non plus.

oniN : d’ou sortent ces chiffres bien trop précis ???

Quand à Troposphère c’est une vaste blague, ca rends le RDC plus ridicule qu’autre chose. C’est le genre de trucs qu’on fait en France dans les écoles d’ingénieur à côté de ses études. Quand je vois comment cela rends certains fiers, je me dis qu’ils manquent d’esprit critique : ce programme spatial est si peu ambitieux qu’il n’a aucune raison d’etre. Il est plus révélateur d’un énorme retard technologique que d’une avancée en ce sens. Mais ca ne fait pas de mal au citoyen extracteur de manganèse dans les mines du Kivu : ca ne coute pas cher non plus.

@LPN,
Nous avons besoin de tout ce que tu dis, routes, hôpitaux etc mais aussi internet ce sont les usages qui ne sont pas les mêmes; Oui comme le dit @oniN les usages sont différents et nous ne pouvons pas ne pas avoir besoin du net.

Vous voyez que j’ai raison, conclut-il. Il n’y a pas sur ce blog une rubrique auto-attalaku, pour ce genre d’articles?
Et si justement, c’est l’absence d’infrastructures qui rendait internet nécessaire en Afrique? Et si le mail était une solution plus rapide que la poste pour échanger des nouvelles? Et si Wikipedia, Google et consort étaient des sources d’informations plus fournies et moins chères que la biblio ou la librairie du coin pour les étudiants? Et si yahoo messenger et skype étaient moins chers que les opérateurs de téléphonie? Ou plus pratique, pour discuter depuis Douala avec le cousin qui est à yaoundé? Et si, et si, et si?

Lorsqu’on danse mal, il ne faut pas accuser son pantalon. Internet n’est qu’un outil, un très bon outil. Et comme tous les bons outils, il fait très bien ce pour quoi il a été conçu, et ne fait pas, ou très mal, ce pour quoi il n’a pas été conçu.

@Jikeb
Ainsi, Western Union serait un outil de communication? Qui plus est peut remplacer Internet?
Tes relations au bled doivent être en haut, si tu en communiques avec eux qu’à coups de Western Union.

@TiAya
Dis donc, ils sont nombreux tes « Si », mais justement, ce ne sont que des « Si », et comme ont dit, « avec des si… ». Bref, si des « si » te suffise, alors c’est tant mieux pour toi.
…Et pour la remarque sur le western union. :). Bon, tu est peut être ironique, mais on ne sais jamais, peut être que tu est à la fois sérieux et incapable de cerner mon propos. Au quel cas, je le reconnais, je n’ai peut être pas été assez clair. Quoi qu’il en soit, bah relis moi, réfléchis un peut, et puis j’espère que tu comprendas ou je veut en venir. Sinon, tant pis.

@jikeb,
les ‘si’ de Ti Aya sont des ‘si’ pseudo-hypothetiques. Ce n’est pas le genre de ‘si’ qui peuvent mettre Kinshasa en bouteille.

Au début je prenais l’article pour du second degré, puisque semble-t-il c’est le style favori de notre bienaimé hôte. Second degré que j’étais d’ailleurs toujours en train de chercher. Mais apparemment, en le (re-re-re oui 3x)lisant, et en lisant les réactions, apparemment c’est pas le cas.
Hum! L’Afrique qu’a pas besoin d’internet? je wanda. (http://www.youtube.com/watch?v=P8JAP9inaPk)

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