A question naïve, réponse toute aussi naïve. Il est reproché à Kweku Adbeli d’avoir abusé de la confiance de son employeur, l’Union des Banques Suisse (UBS) et d’avoir provoqué la perte record de près de deux milliard de dollars sur le marché boursier. Deux milliards de dollars de pertes sur les fonds propres de la banque, c’est bien là les lourdes charges que fait peser UBS sur ce « trader délinquant » et j’en suis fort aise. Mais « nous » autres blédards que reproche-t-on au blédard Kweku Adoboli ?
Comme vous vous en doutez tous, je ne vais pas m’appesantir sur le côté « intrigue financière » de cette affaire. D’une part, parce que la finance reste et demeure pour moi une science occulte à laquelle je ne comprend rien et qui ne m’attire pas plus que cela au grand dam de mon banquier. Et, d’autre part, parce que la dernière fois que je m’y suis intéressé c’était pour comprendre d’un point de vu technique comment Jérôme Karviel avait procédé. Je peux vous avouez que j’ai failli en avoir les côtes brisées tellement c’était drôle. J’ose croire que le blédard Kweku Adoboli, diplômé en informatique et en management était un peu plus malin de ce coté là.
Ce qui nous amène à notre propos du jour. Au siècle passé, si l’on m’avait dit que Kweku Adoboli existait j’aurais crié au mensonge. Quand je dis Kweku Adoboli c’est bien sûr ici sous forme symbolique. Ce qu’il faut comprendre c’est « un blédard ayant accès à un portefeuille d’investissement pouvant monter jusqu’à deux milliards de dollars« .
Qu’un blédard ait accès à cette somme c’est possible étant donné l’argent disponible officiellement et officieusement au bled. Mais ce qui fait de Kweku un homme emblématique c’est qu’il s’agit ici de l’argent de « l’homme blanc« . Pourquoi j’insiste sur ce dernier détail ? C’est que, au siècle dernier, quand j’ai atterri dans l’hémisphère nord on m’avait expliqué qu’il n’y avait pas moyen pour un blédard de creuser son trou par ici. Il fallait gagner son diplôme et rentrer au bled. Mais, une fois le papier en poche, j’ai comme l’entièreté des blédards de ma promotion universitaire été fortement incité à rester en Europe à coup de sonnant et de trébuchant.
A cet étape du parcours d’un blédard hors de sa base, il y avait aussi toute une batterie de dictons qui circulez du genre
à compétence égale on choisira jamais un blédard
ou encore
tu vas faire que de la basse besogne
et le fameux:
on ne te laissera jamais atteindre le conseil d’administration
et j’en passe et des meilleures.
La faute à qui ? La faute à un racisme déguisé, ajouté à une xénophobie systématique, un esprit clanique, sans parler du tribalisme cher à mon comparse LPN. Mais il demeura une poignée d’irréductible qui osaient croire que l’attrait du biblos pour l’argent et pour la gagne en générale finirait par être plus forte que cette xénophobie primaire qui nous habite tous au sud comme au nord. Et c’est ainsi que contrecarrant tous les pronostiques Kweku Adoboli est né.
Quand j’en parlais autour de moi personne ne me croyait. Mais aujourd’hui tout le monde le voit, sur tous les écrans et le lit dans tous les journaux: il existe des blédards qui ont la confiance indéfectible de nos voisins du Nord car ceux-ci n’hésitent plus à leur confier ce qu’ils ont plus précieux c’est à dire leur argent.
Ce que je reproche à Kweku Adoboli ? Personnellement rien du tout. Bien au contraire même, je le remercie d’avoir prouvé par l’absurde que ce monde n’est pas si foutu que l’on veut bien le croire pour nous autres blédards.