Je me souviens du jour ou « Wanna Be Starting Something » de Michael Jackson est sorti. J’étais un gamin qui ne comprenait qu’un mot sur dix en anglais mais ce son m’a accroché dès les premiers accords. Mais c’est surtout le rythme afro endiablé qui termine la chanson qui m’a captivé: “Mamase mamasa mamamakusa”. Ha ha, quelle créativité ce petit Jackson (il était petit à cette époque), sincèrement: respect. Quelques minutes plus tard, je tombe évidement de haut quand mon grand frère et sa bande lachent un « mais c’est le son de Manu Dibango ça ! ». C’est pas possible! Le petit Michael avait donc bossé avec un frangin sur un son? Ce gars là doit vraiment respecter le style du bled. Et bien non, il avait volé les paroles et le rythme. Incroyable! Réaction immédiate du concerné: et je te colle un petit procès au derrière et le tour est joué. Le staff d’un Michael ayant le vent en poupe réagit bien et propose un arrangement à l’amiable. L’affaire est si bien étouffée que seuls de fiers africains et quelques avocats en quête de jurisprudence s’en souviennent.
Voila que plusieurs années après, en plein recyclage des tubes des années 80, un producteur inspiré décide de réutiliser l’ambiance que crée ce décrochage régional dans le son de Mr Jackson (il est devenu vieux depuis). Le Makosa atterrit dans une chanson de Rihanna qui a tôt fait de déchirer les pistes de danse de clubs sur toute la planète. Les jeunes adorent cette trouvaille et les vieux blasés étalent leur science en déclarant connaitre l’original de Michael Jackson. Le producteur prudent pousse même le bouchon jusqu’à payer des droits d’auteur à Michael Jackson et à un Sony/BMG soudainement tous devenus amnésiques. Exit donc le Grand Manu qui pourtant chante son « Soul Makosa » à chacune de ses sorties depuis plus d’une trentaine d’année. Le vieux routier intente bien un procès mais est débouté. Cet échec aurait sonné le glas des poursuites pour plagiat si le 15 Janvier derniers la situation ne s’était pas reproduite. En effet, Missy Elliot a reconnu avoir utilisé « Douala By Night » de Tim et Foty dans son titre « Dog In Heat ».
Je reste convaincu qu’il existe des centaines d’autres cas similaires dans les catalogues de la musique américaine. Ils n’ont pas été mis au grand jour car les dites chansons n’ont pas eu de succès. Au delà du retour financier, peu conséquent selon Tim et Foty, sur une telle opération c’est surtout un manque de reconnaissance de la créativité de tout un continent qui m’attriste. J’ai souvent remarqué que chaque fois qu’un nouveau son casse tout en Europe ou aux States il y a toujours un Africain qui sort d’on ne sait où et qui lache comme mon frère à l’époque: « Mais ça on connait, on dansait dessus il y a dix ans au bled ». C’est cette attitude de blasés qu’on devrait changer. Si on mettait à sa propre place chaque son qu’on nous pique on saurait quelle est notre place réelle dans la musique moderne. Je dis bien moderne parce que pour ce qui est du traditionnelle je considère le débat clos: faut pas déconner quand même.
Un commentaire
Roberta
Mince alors, faut-il faire adopter Hadopi en Afrique pour protéger les artistes ?