Un Diner Presque Parfait

plats africainsCela fait près de 50 ans que périodiquement des immigrés subsahariens quittent le bled pour aller chercher fortune ailleurs. Pourtant, à l’inverse des turcs, maghrébins et autres blédards made in extrême orient, les rayons des supermarchés d’Europe ne semblent pas se remplir de mets « made in bled« . Faisons le tour de quelques mets que j’aimerais pouvoir acheter en me rendant dans les supermarchés européens.

1°) La banane plantain ou allôko (comme on dit en Afrique de l’ouest). Sa cuisson est telle que le nombre de repas basés sur cette race de banane (ici le mot race est utilisé dans sa définition primaire :ndla) est invraisemblable. Bouilli, frit, écrasé, les méthodes de cuisson et de présentation sont tellement diverses et variés que je trouverais normal de voir un pays blédard être le premier exportateur de banane plantain. Mais, non seulement il n’en ait rien, mais en plus je me retrouve toujours en train d’expliquer à des audiences d’indigènes médusées (de biblos quoi) qu’il y a autant de races de bananes que de races de pommes de terre…

2°) Le piment. Ce condiment est une spécialité du bled. Si vous êtes blédard et que vous  n’ajoutez pas de piments bien concentré dans votre plat… c’est que vous n’êtes pas un vrai blédard. Et pourtant bien que les techniques de conditionnement soient au point et que je sais qu’il existe des marques qui tentent vainement de faire la promotion de ce fruit (parce que c’est un fruit… vous avez remarquer il y a des graines à l’intérieur 😉 ), je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi ce condiment est délaissé par les grands distributeurs. Et que l’on ne me dise pas que les biblos ne mangent pas de piment. J’en connais un qui envoie son fils au fin fond de Matongué à Bruxelles une fois tous les 2 mois pour qu’il le ravitaille en « or rouge ». Un conseil cependant, on me signale qu’une marque de « harissa » a fait une percée sur le marché européen mais que son emballage dans un tube de dentifrice prête à confusion

Zut, mon supermarché a encore loupé la 10ème édition de la FIARA du Sénégal 😉 (source)
fiara

3°) Le manioc. Ce plant n’est pas spécifique des blédards du continent noir mais on peux le dire .. le manioc c’est comme le cochon… tout est bon dans le manioc 😀 . Pour preuve le nombre de produits et de mets dérivés au bled de cette plante d’origine sud américaine est tout simplement incroyable. Pour chacun de ces mets on pourrait conditionner et créer des marques et des produits d’appel qui feraient le plaisir des blédards mais aussi des autochtones occidentaux.. mais je ne vois hélas toujours rien à l’horizon. Encore une fois je fais semblant de ne pas évoquer la marque de feuilles de manioc (poundou/saka saka) d’origine nigériane vendu dans certain enseignes de la place et dont le gout rappelle l’huile de vidange.

4°) Le bissap. Cette boisson d’Afrique de l’ouest à base de fleurs d’hibiscus est tout simplement délicieuse… et pourtant mise à part dans les restaurants d’Afrique de l’ouest qui vous l’offrent dans des bouteilles qui n’ont rien à voir avec le breuvage qu’elles contiennent réellement, je ne détecte toujours pas cette élixir dans mon rayon boissons non alcoolisés. Je ne sais toujours pas où ni comment m’en procurer et je suis sur, comme pour le reste des produits déjà proposés, qu’il existe un marché en occident. Pour la petite histoire entrer dans un restaurant juste pour acheter une bouteille de bissap et ressortir immédiatement ça ne le fait pas: croyez moi je l’ai vu… et je l’ai essayé.

5°) « Last but not least » comme disent nos amis anglophones, je ne peux m’empécher de traiter le cas des nombreux alcools et autres breuvages alcoolisés made in bled: les vins de palme, de banane, de maïs et j’en passe ainsi que tous les alcools plus forts que l’on retrouve dans chacune des régions du bled. Pourquoi ne pas créer de vrais brasseries du bled… mais qui ne fonctionnerait pas en nous refourguant de la Primus et autre Mutzig dans leur pâle déclinaison blédarde mais en faisant de vrais alcool du bled.. croyez moi je suis sur que les pubs irlandais et autres café de Paris ou de Berlin nous remercieraient grandement.

Une collègue de travail m’a dit un jour: « LPN tu mange trop avec tes yeux, tu devrais apprendre à manger avec le goût et les saveurs. » Et je pense que fondamentalement, dans un monde parfait, elle aurait totalement raison, hélas dans la vraie vie, elle a tort. Nous les blédards, moi au premier rang, n’avons pas encore compris cette leçon. Notre bouffe est comme celle des autres cultures riches et merveilleuse à découvrir mais clairement, il nous manque le marketing et l’exposition nécessaire pour la rendre économiquement intéressante.

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10 Commentaires

Tout d’abord il faudrait nous arranger pour que les pakistanais arrêtent de vendre nos produits… Ensuite pour le reste on verra

D’abord qui dit que c’est « nos » produits, il y’a notre nom dessus? Ensuite, pourquoi tu veux que les pakistanais arrêtent de vendre « nos » produits? Les pakistanais portent leur string, ca te serre?

Et ben voilà le business’ plan : tu seras à l’Afrique ce que les frères Tang sont à l’Asie. ‘Les supermarché du petit nègre », ca sonne bien, non ?

Vu ce qui se raconte sur les frères Tang, tu peux te faire de sacrés golden glaouis.

 » Une collègue de travail m’a dit un jour: « LPN tu mange trop avec tes yeux, tu devrais apprendre à manger avec le goût et les saveurs. »  »

Truc rigolo : essayes de manger dans le noir, ca donne des résultats bizarres. Surtout dans le concept à la mode de restau en aveugle : on te donne un plat surprise, à toi de deviner ce que c’est. Bizarrement, tu te rends compte combien les yeux sont importants dans le gout : http://essentielle.lalibre.be/fr/1467/ce-soir-on-dine%E2%80%A6-dans-le-noir

Et puis c’est pas un hasard si les grands restaux apportent un énorme soin à la présentation.

Les piments, si ce sont les mêmes que dans la cuisine thaïlandaise, j’en ai vu au GB de City 2 à Bruxelles, quand à la harissa, c’est vraiment très facilement trouvable dans tous les supermarchés de France (comme j’en achète pas, je sais pas pour la Belgique. Mais c’est plus facile de trouver du tabasco en Belgique qu’en France.).

De toute façon qu’est ce que tu t’en fous, tu travailles pas loin de Matongé, tu peux donc facilement t’y ravitailler 🙂

Petit nègre arrête avec la bouffe du bled et arrête de faire ton nègre. Passe au hachis parmentier et à la saucisse de Morteau, c’est quoi ce repli identitaire que tu nous fais ? :o)

@Gangoueus la situation est graave, je parle bouffe là, donc c’est une question de survie alimentaire de la plus haute importance!! Tu veux me dire que si tu pouvais acheter ton bâton de manioc au supermarché tu refuserais l’achat sous prétexte de repli identitaire à peine voilé… et le salut de tes intestins tu y a pensé 😀 !!!

La problématique que tu poses est importante. Et dans certains supermarchés, elle est prise en compte. J’habite en banlieue parisienne, et on trouve du poisson salé et des poissons de mer prisés par les ressortissants d’Afrique centrale au Géant Casino de ma ville. Pas de bissap, mais des bananes plantains également. Par réflexe, on continue toutefois à se fournir chez une indienne dans la galerie marchande. On n’a pas encore le manioc.

Cela étant dit, j’aimerai dénoncer une forme de repli identitaire que je constate chez nombre d’africains. Certains sont en Ile de France depuis plusieurs dizaines et se ferment à la découverte de ce que mange l’autochtone. Escargots, grenouilles, tartiflette, fondue savoyarde, boeuf tartare, choucroute, etc. Chacun reste reclus derrière ses fondamentaux. C’est regrettable.

@Gangoueus loin de moi l’envie de promouvoir les remplis identitaires… je trouve cela contre productif et c’est une réaction primaire. Je suis d’accord avec toi, manger ce qui se fait sur place c’est aussi une manière de découvrir l’autre. Si tu as fait entre 4 à 10 000 kilomètres pour te retrouver chez les biblos ce n’est pas pour bouffer uniquement du manioc , du poissons salés et que sais-je encore. Si c’est ce que font pas mal d’entre nous ici, c’est qu’ils n’ont rien compris!!
Mon but à travers se billet est d’épingler un secteur sous exploiter à mes yeux par ceux qui devraient potentiellement (ahh que je n’aime pas ce mot!!) en tirer le plus de profits, les blédards. C’est une vision plus économique que communautaire que je décris.

Escargots … de bourgogne ?
grenouilles … oui, on mange des batraciens en France, mais pas très couramment.
tartiflette … savoyarde ?
fondue savoyarde
boeuf tartare … steak tartare ? Ok. (même si je connais des belges qui seraient capables de revendiquer la paternité du « filet américain »)
choucroute … alsace ?

Pas très parisien tout cela, n’est-ce pas ?

J’aurai commencé par citer les fromages qui puent pour parler de bouffe française, puis le rouge qui tâche. Le parisien, c’est plutôt sandwich au jambon (à base de baguette, of course).

Mais je dis ça pour troller. C’est vrai que c’est dommage d’être en France et ne pas toucher au « jambon-beurre avec un ballon de rouge ». D’ailleurs le Français quand il arrive à l’étranger, tôt ou tard, il finira aussi par se plaindre de ne pas trouver de pain « comme en France ».

Le « repli » suppose qu’on a avancé, avant de se « replier ».
Repli identitaire, les populations immigrées ont jamais été fondues dans la masse, avant d’en sortir?

C’est juste un « stay natural », mais on préfère victimiser ceux qui préfèrent les plantains à la choucroute, comme si c’était un crime. On aura tout lu.

Soit on est libre de manger ce qu’on veut, soit on ne l’est pas; mais pas les 2 à la fois.

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